vendredi, juin 30, 2006

Le culte de l’arbre en France et en Roumanie

En Bretagne, l’arbre est à considérer comme l’élément constitutif du rituel funéraire, particulièrement dans la commune de Plougastel-Daoulas (Finistère), qui a fait l’objet de nos études. L’arbre constitue alors la caractéristique fondamentale du rapport à la mort. Au contraire, en Roumanie, les funérailles, cérémonie qui accompagne l’une des principales étapes de l’existence de l’homme, ne représentent pas la seule occasion d’utilisation de cet arbre.

1) L’arbre, symbole de fécondité en Roumanie

En effet, en Roumanie, d’autres cérémonies marquant ces étapes – ou rites de passage – nécessitent la présence symbolique d’un arbre. C’est le cas de la naissance et du mariage par exemple ; l’arbre est alors utilisé dans le but de favoriser la fécondité.

Des célébrations suscitées par les préoccupations de la société paysanne ou rurale font, elles aussi, intervenir le culte de l’arbre. Alain Bouras précise que, parmi cet ensemble festif, on distingue les fêtes « qui se répètent chaque année (même si leur date est mobile) de celles qui accompagnent une occasion dont la date n’est pas fixée ». Il y a donc séparation en deux grands groupes de fêtes : « calendariques ou saisonnières d’une part, de modification du corps social (ou de rééquilibrage du groupe) d’autre part ».

La Roumanie, rappelle Alain Bourras, est « une société de cultivateurs et d’éleveurs et l’on peut s’attendre à ce que leur monde spirituel soit organisé collectivement de manière à mener l’individu à une conception du monde adéquate : construite en fonction du cycle de reproduction de la végétation, donc annuelle. On imagine la place que peut y prendre l’arbre, végétal par excellence. »

Ces fêtes peuvent être la source d’explications supplémentaires et en particulier la célébration du mariage puisque les noces sont en étroite relation avec la mort en Roumanie comme en France.

2) Sapin, hêtre ou pommier ?

Si l’arbre et son allure générale ainsi que la pomme sont les éléments invariants du rituel breton français, dans le rituel roumain, ces éléments varient par la forme et la nature selon les régions.

En effet, en Roumanie, les rituels de culte de l’arbre utilisent des espèces d’arbres et des formes diverses. Selon les régions, l’arbre peut être un grand sapin appelé « pom » ou « copac » que l’on amène lors des funérailles d’un jeune homme célibataire pour le marier à lui (des occasions où l’arbre vient prendre la place d’un homme se rencontrent également). Mais il s’agit parfois d’un hêtre, d’un pommier ou d’une branche de l’un de ces arbres à laquelle des pommes ont été attachées. Quelquefois, une autre espèce d’arbre est utilisée : une simple branche, travaillée ou non, et sur laquelle sont parfois fichées des pommes, d’autres fruits et d’autres objets ; enfin, il peut être encore un pilier de bois décoré qui vient à côté ou à la place d’une croix.

3) Spécificité des rituels roumains et bretons

Il ne faut pas perdre de vue que les rituels funéraires français et roumain prennent place à l’intérieur de sociétés identitaires spécifiques qui ont chacune développé un type d’organisation et un mode de fonctionnement en étroite relation avec la délimitation d’un territoire dans lequel s’inscrivent ces rituels et par lequel se définissent et se reconnaissent les acteurs de ces rituels « dendrolâtriques ».

Le rituel funéraire breton est célébré sous une forme commémorative le jour de la Toussaint selon l’Église catholique romaine alors que cette célébration a lieu en Roumanie selon le calendrier de l’Église orthodoxe orientale.

Bibliographie

Alain Bouras, Connaissance et utilisation des arbres dans le village roumain, Paris, oct. 1982.
Henri-François Buffet, En Bretagne morbihannaise. Coutumes et traditions du Vannetais bretonnant au XIXe siècle, Grenoble-Paris, 1947.
Paul Henri Stahl, « La dendrolâtrie dans le folklore et l’art rustique du XIXe siècle en Roumanie », Archivio Internazionale di Etnografia e Preistoria, vol. II, 1959, Torino.

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